Bernard Manciet
Bernard Manciet (1923-2005) a placé toute son œuvre sous le signe de son village natal, Sabres, dans la Grande Lande de Gascogne, et du parler « noir » de cette région, une forme de gascon au phonétisme assez particulier dont il a su faire, au fil des ans, un véritable style, et même, au-delà, un authentique mythe, passant ainsi directement du local au cosmique. Très cultivé, un temps diplomate après des études à Bordeaux puis Paris, Manciet fut plus que nul autre un homme de quelque part et de partout. Les fonctions qu’il occupa en Allemagne, puis au Brésil, comme toute son existence passée à quelques encablures de Sabres à partir du début des années 1950, sa grande connaissance du latin, du grec, de l’allemand et des langues ibériques, ont fait de lui une synthèse vivante de l’eau et du feu, un « monstre d’originalité », comme aimait à le dire son ami le poète et médiéviste René Nelli.
Depuis ses premiers poèmes publiés dans la revue Reclams à la fin des années 1940 jusqu’à son grand œuvre poétique, L’Enterrement à Sabres, grand poème à la fois épique et familier où sont réunis toutes les petites gens de la Lande, Manciet n’a pas cessé, à son rythme, de développer dans tous les sens une écriture que l’on reconnaîtrait entre mille autres. Poète donc, auteur d’une vingtaine de recueils, il fut aussi prosateur, aussi bien dans ce court roman fascinant qu’est Le Jeune Homme de novembre, que dans ces très beaux et très brefs récits autobiographiques publiés l’année même de sa disparition sous le double titre, en français, de Jardins perdus et Les Murmures du mal. Essayiste de haut vol, on lui doit en particulier deux livres majeurs : Le Triangle des Landes et Le Golfe de Gascogne, où la grande Histoire et la rêverie du poète se rencontrent avec bonheur. Dans la dernière partie de son existence, Manciet entama une assez extraordinaire carrière de diseur public, entouré de musiciens à la hauteur de sa parole majesteuse : Bernard Lubat, Michel Portal, Christian Vieussens, Dominique Regef, Beñat Achiary... l’accompagnèrent, le premier plus que tous, dans cette aventure qui fut l’occasion pour Manciet d’écrire de grandes fresque verbales qui ont conservé, à la lecture, toute leur force évocatrice. Parallèlement, Manciet devint auteur pour la scène, avec des compositions où les grands mythes antiques (Orphée, Iphigénie, Ulysse) ou contemporains (le torero El Yiyo) devenaient les personnages de sa propre légende.
On ajoutera pour finir que Manciet, animateur pendant de longues années de la revue littéraire Òc, fut un grand découvreur de talents, en lecteur attentif et impitoyable qu’il savait être.
Philippe Gardy
Bernard Manciet dans notre catalogue :
Sonnets
Auteurs
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